Programme : Raconte-moi l'espace

Ça sert à quoi l'espèce de papier jaune sur les satellites ?

25 Oct 2023 - 6 minutes
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Résumé de l'épisode

Ça sert à quoi l'espèce de papier jaune sur les satellites ? Annie Bourdette, responsable du service Ingénierie et intégration au Centre national d'études spatiales, répond à la question ! Ce papier est un millefeuille de couche très fines et ressemble aux couvertures de survie utilisées par les pompiers, et pour cause ! Cela vient des premières recherches pour fabriquer des protections de satellites.

Bonjour, je m'appelle Guillaume et j'ai neuf ans. Ça sert à quoi l'espèce de papier jaune qu'il y a sur les satellites ?

Bonjour Guillaume. Je m'appelle Annie. Je travaille au CNES, au Centre national d'études spatiales et je travaille sur les satellites au moment où ils sont assemblés et testés avant de les envoyer dans l'espace.

Pour répondre à ta question : c'est en fait un peu comme une couverture de survie pour protéger le satellite des températures extrêmes : ces couvertures de survie qu'utilisent les pompiers, par exemple, pour mettre sur le dos de personnes blessées. D'ailleurs, les couvertures de survie que l'on utilise sur Terre, elles viennent des recherches qu'ont fait les premiers ingénieurs qui ont conçu des satellites pour protéger les satellites des températures extrêmes qu'il va rencontrer dans l'espace.

Tu entends, Guillaume ? Je suis en train de manipuler ce fameux papier jaune. Cette fine couverture, on appelle ça une MLI. Ce sont les initiales en anglais de Multi Layer Insulation. En français, on peut traduire par isolation multicouche parce que c'est composé effectivement de plusieurs couches très très fines. Pour te donner un ordre de grandeur, la feuille externe, donc celle que l'on voit, celle qui est à l'extérieur du satellite, elle fait environ 50 microns. Je ne sais pas si tu as vu déjà ce que c'est qu'un micron, mais un micron est 1000 fois plus petit que le millimètre. Donc c'est encore plus fin qu'un cheveu.

Et les couches à l'intérieur sont encore plus fines que cette couche externe de 50 microns. Ces couches sont comme des films plastiques recouverts de métal et elles sont séparées entre elles par un intercalaire qui ressemble à du tulle. Le tulle, c'est la matière des tutus de danseuse par exemple. Cet intercalaire permet d'éviter que les différentes couches ne se touchent par contact, en transmettant la chaleur ou le froid. Et c'est la feuille externe dont on a parlé qui donne la belle couleur jaune doré à cette couverture.

 

Comment est-ce qu’on fixe cette MLI ? Cette couverture sur le satellite ?

 

Eh bien, comme toi tu fermes tes baskets avec des scratchs, des velcros ; on utilise le même principe, la même chose.

On attache des velcros sur la structure, sur la boîte du satellite et on vient fixer la MLI avec des velcros. Et la fabrication de cette couverture thermique, c'est un peu comme un travail de couturières. On fait d'abord un patron, c'est à dire un dessin, un modèle qui tient compte de la géométrie, de la forme du satellite. On le dessine, on le fabrique, on fait des essayages et enfin, on fabrique la version finale que l'on va ensuite mettre en place sur le satellite.

 

Pourquoi est-ce l’on recouvre les satellites d’une couverture isolante ?

 

Donc maintenant, si on se pose la question, pourquoi est-ce que nous, les ingénieurs, on décide de recouvrir les satellites d'une couverture isolante ? Parce que l'espace, c'est un endroit où il fait à la fois très chaud si l'on est face au soleil, et très froid si on est à l'ombre. Et le satellite il passe plusieurs fois par jour à l'ombre et au soleil.

Et donc il rencontre des températures très différentes : pour te donner un ordre de grandeur des températures qu'il rencontre, ça peut être plus 150 degrés Celsius face au soleil et moins 150 degrés Celsius quand on est à l'ombre. Pour prendre une comparaison, dans un congélateur, il fait à peu près moins de 18 degrés Celsius. Et en été, quand il fait très chaud, on est à 40 degrés. Le satellite passe plusieurs fois par jour à l'ombre et au soleil, et il rencontre donc des températures très différentes.

Donc si l'on veut que les équipements qui sont à l'intérieur du satellite fonctionnent correctement pour que le satellite remplisse correctement sa mission, il faut qu'on lui fasse l'équivalent d'une climatisation, comme pour une maison. Et c'est ce qu'on appelle le contrôle thermique du satellite. Une bonne isolation, la MLI et également des réchauffeurs comme dans une maison, on peut installer des radiateurs.

 

Si un composant tombe en panne, qu’est-ce qu’on fait ?

 

Et Guillaume, je ne sais pas si tu t'es déjà posé la question de savoir si un satellite tombe en panne, si un composant tombe en panne, qu'est-ce qu'on fait ? Eh bien, pour un satellite, s'il ne fonctionne plus, on ne peut pas le ramener au garage pour le réparer. Donc auparavant, avant de l'envoyer dans l'espace, on fait tout ce qu'on peut pour qu'il ne tombe en panne.

C'est à dire qu'on fait beaucoup de tests avant de l'envoyer dans l'espace. On fait des vérifications, des essais pour tester que le satellite pourra bien résister au chaud et au froid. On fait ce qu'on appelle des essais thermiques, c'est à dire qu'on vient placer le satellite dans un caisson, une cuve thermique. Il y en a de plusieurs tailles, en fonction de la taille du satellite, par exemple pour des gros satellites, des satellites de plusieurs tonnes, on les met dans une immense enceinte thermique qui peut faire 700 mètres cubes.

Donc 700 mètres cubes, on peut y mettre un autobus à l'intérieur, donc c'est vraiment immense. Ensuite, on fait le vide avec des super pompes car dans l'espace, c'est quasiment le vide et on a également des moyens de simuler, de reproduire des températures très froides ou très chaudes.

On met le satellite au milieu de cette enceinte et on vérifie ensuite son fonctionnement. Et avec tous ces essais, on peut vérifier que notre fameuse MLI est bien efficace et va bien jouer son rôle de protection thermique du satellite.

Voilà Guillaume, j'espère avoir correctement répondu à ta question et t'avoir donné envie d'en savoir un peu plus sur les satellites et leur environnement. Et devenir, qui sait, peut-être un futur collègue au CNES.

Merci Annie Bourdette, responsable du service Ingénierie et intégration au Centre national d'études spatiales.

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